PROPOSITION DES ORDRES DE SANTÉ POUR AMÉLIORER L’ACCÈS À L’OFFRE DE SOINS GRACE À L’INTERPROFESSIONNALITÉ
Accueil > PROPOSITION DES ORDRES DE SANTÉ POUR AMÉLIORER L’ACCÈS À L’OFFRE DE SOINS GRACE À L’INTERPROFESSIONNALITÉ

Les difficultés et inégalités territoriales en matière d’accès à l’offre de soins tendent à se creuser, en dépit des actions qui ont pu être engagées ces dernières années.
L’accès à la santé et à la prévention est devenu un sujet prioritaire pour l’ensemble des Français. Il est indispensable d’engager une politique volontariste ayant des impacts immédiats.
Forts de ce constat, les Ordres des professions de santé, réunis au sein du Comité de Liaison des Institutions Ordinales, se mobilisent pour faire des propositions à même de répondre aux besoins des patients, au cœur de leurs priorités.
Ces propositions s’inscrivent dans le cadre des valeurs et des principes auxquels les Ordres sont particulièrement attachés à savoir:

o La garantie de la qualité et de la sécurité des soins,
o Le respect de la déontologie et du cadre d’exercice des professions de santé réglementées,
o La promotion de la santé publique.

A l’issue de leur réflexion commune, les Ordres souhaitent accompagner la mise en œuvre de mesures pragmatiques, adaptées aux problématiques territoriales et surtout pouvant avoir un impact immédiat en termes d’amélioration de l’accès à la santé et d’attractivité des professions de santé. Il s’agit notamment de favoriser les actions de coopération entre professionnels de santé, la transversalité des prises en charge mais aussi la valorisation des compétences des professionnels de santé. les propositions visent à construire une organisation de la médecine de ville répondant au principe « du bon professionnel de santé, au bon endroit, au bon moment».

Les propositions des Ordres réunis au sein du CLIO Santé, s’articulent autour de 4 axes thématiques.

1) Améliorer l’accès au médecin traitant en développant le partage d’actes et d’activités entre médecins et professionnels de santé

Le Comité de Liaison des Institutions Ordinales – Santé, a construit cette proposition, en partant des besoins du patient, au cœur des priorités de l’ensemble des Ordres. Cette proposition construite, à partir des constats dressés sur le terrain, a vocation à avoir des impacts immédiats en permettant à tous les Français et en priorité aux patients en affection de longue durée et aux patients vulnérables, de disposer d’un médecin traitant, en augmentant le temps médical disponible.
Aujourd’hui, une partie des Français ne bénéficie pas d’un médecin traitant. Dans certains territoires, les professionnels de santé se sont mobilisés pour mettre en œuvre dans le cadre de structures d’exercice coordonné, des organisations à même de faciliter le travail entre les différents professionnels de santé. Cependant, ces structures d’exercice coordonné restent inégalement réparties, difficiles à mettre en place et toutes les mesures permettant de dégager du temps médical comme le déploiement de certaines actions facilitant le partage d’actes ou le recours direct à des professionnels de santé dans le cadre de parcours spécifiques, sont partiellement mis en œuvre. Dans certains territoires, la démographie des professionnels de santé particulièrement insuffisante, ne permet plus d’avoir des ressources médicales disponibles pour porter ce type d’organisations.
C’est pour cela que le CLIO-Santé a travaillé en partant de la situation de la population et en dissociant les situations dans lesquelles le patient :

  1. A un médecin traitant, exerçant ou non dans le cadre d’une structure d’exercice coordonné,
  2. N’a pas de médecin traitant (voir schéma).

Les propositions du CLIO-Santé s’appuient sur deux axes complémentaires :

• Développer dans chaque territoire les partages d’actes et d’activités des médecins vers les professionnels de santé exerçant au sein d’équipes de soins primaires et de proximité pour dégager du temps supplémentaire au médecin traitant afin d’augmenter le nombre de patients pris en charge par les médecins, tout en préservant la qualité de la prise en charge de chacun,
• A défaut de médecin traitant disponible, confier aux autres professionnels de santé une mission en termes d’orientation du patient dans le système de santé, en assurant une première prise en charge, et en organisant avec les autres acteurs du territoire, l’orientation vers un médecin traitant.

Les deux propositions doivent être mises en œuvre conjointement. En effet, l’augmentation du temps médical obtenu par le développement du partage des actes et des activités entre médecins et professionnels de santé, devra permettre de répondre aux besoins de tous les patients y compris ceux domiciliés dans des territoires dont la démographie médicale est particulièrement insuffisante.
L’objectif est d’éviter les pertes de chances en développant le partage d’actes et d’activités entre médecins et professionnels de santé, et en favorisant le recours direct aux professionnels de santé disposant des compétences spécifiques pour certains parcours.
Pour cela, il faut accélérer et généraliser, le recours à l’exercice coordonné en simplifiant les conditions de sa mise en œuvre. La notion de coordination du médecin doit être étendue à tout regroupement de professionnels de santé qui s’unissent pour définir entre eux et de façon contractuelle, une organisation territoriale des prises en charge par le partage des actes et des activités entre médecins et professionnels de santé. Dans ce cadre, la coordination entre professionnels de santé doit se faire par le partage des données de santé via l’espace numérique de santé et doit être facilitée par l’usage des outils numériques.

Dans les territoires où la démographie médicale est particulièrement insuffisante et où le patient ne peut recourir en première intention à un médecin traitant, une mission d’orientation et de prise en charge de première intention est confiée aux autres professionnels de santé du territoire. Ces professionnels de santé assurent une première évaluation. En fonction de l’état de santé et de la connaissance d’un diagnostic antérieur, ils peuvent mettre en œuvre un protocole validé et/ou orienter le patient vers le Service d’ Accès aux Soins ou le service de médecine d’urgence d’un établissement de santé.
Ces mesures constituent des mesures de premier recours. Elles doivent s’accompagner de l’intégration du patient dans le dispositif d’un parcours de soins à la recherche d’un médecin traitant.

2) Accélérer la mise en œuvre des mesures existantes en faveur de l’élargissement des missions des professionnels de santé, des transferts d’activités et assurer la mise en cohérence de la réglementation

Le cadre législatif permettant la mise en œuvre rapide d’une meilleure répartition des interventions des professionnels de santé auprès du patient, existe d’ores et déjà.
Ces dispositions doivent être rendues opérationnelles au plus vite. Il s’agit d’accompagner la mise en œuvre effective de ces dispositions et d’assurer rapidement la publication de certains textes et décrets d’application nécessaires. Ces mesures sont en effet, de nature à améliorer les prises en charge, à gagner du temps médical disponible en recourant à d’autres professionnels de santé pour certains actes. Les expérimentations doivent être accélérées et généralisées à l’ensemble du territoire national pour toutes les formes d’exercice coordonné.
Le déploiement des nouveaux métiers doit être également accéléré et soutenu. Toutes les mesures de nature à améliorer le maillage des territoires par des professionnels de santé et l’accès au système de santé doivent être encouragées.

L’application des textes réglementaires en attente et la mise en cohérence de ceux en vigueur doivent être mises en œuvre.

3) Améliorer la lisibilité du système de santé au travers d’une organisation définie et partagée entre les professionnels de santé et la population

La lisibilité du système de santé pour les citoyens comme pour les professionnels de santé doit être améliorée. La mise en œuvre des mesures d’amélioration de l’accès aux soins et de simplification des parcours de soins doit être explicitée pour en faciliter l’usage.
Cela nécessite de connaitre plus précisément les évolutions relatives aux périmètres de prise en charge des différentes professions de santé, de mettre à disposition des outils de partage d’informations (outils numériques, annuaires entre professionnels de santé … ) ou de s’appuyer sur le bon usage des nouveaux modes de prise en charge comme la télésanté.
Afin notamment de renforcer la pertinence des actes, une information citoyenne claire et compréhensible des organisations des prises en charge est indispensable. Pour les usagers, il s’agit tout en respectant le principe de liberté de choix du praticien par le patient et plus généralement les droits des patients, d’être accompagné, orienté dans le bon usage du système de santé.

4) Valoriser les compétences des professions de santé au travers des dispositifs de formation et garantir une démographie des professionnels de santé cohérente avec les besoins de la population

L’amélioration de l’attractivité des professions de santé est une nécessité.
Les mesures engagées en faveur de l’augmentation du nombre d’étudiants en formation doivent être poursuivies et évaluées. Au-delà, il convient de veiller à respecter les objectifs définis en termes de nombre de professionnels de santé formés chaque année, en veillant notamment à mettre en place toutes les mesures nécessaires pour éviter les abandons en cours d’études. Cela passe notamment par un renforcement des moyens nécessaires à la bonne organisation de ces formations, la facilitation de l’organisation des stages et un développement de la réalisation des stages en ambulatoire
Le processus d’universitarisation pour les professions de santé concernées, doit être poursuivi afin de favoriser la transversalité entre les formations. Elle doit également être de nature à favoriser un meilleur maillage des professionnels de santé sur l’ensemble du territoire dans un souci de cohérence avec les besoins de la population.
Parallèlement, la formation continue doit être effectuée et favorisée, tous modes d’exercices confondus.


Il appartiendra aux pouvoirs publics de décliner les conditions de mise en œuvre de ces propositions, dans le cadre d’une évolution du cadre juridique et conventionnel.
Parallèlement, chacun des Ordres constituant le CLIO-Santé, soumettra au gouvernement ses propositions individuelles qui complèteront et préciseront cette proposition commune.


Philippe POMMAREDE: président du Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes
Patrick CHAMBOREDON : président du Conseil national de l’Ordre des infirmiers
Pascale MATHIEU : présidente du Conseil national de l’Ordre des masseurs-Kinésithérapeutes
François ARNAULT: président du Conseil national de l’Ordre des médecins
Eric PROU : président du Conseil national de l’Ordre des pédicures podologues
Carine WOLF-THAL: présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens
Isabelle DERRENDINGER: présidente du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes


-